"Helena Vannek"
Je
viens de terminer ce livre d’Armel Job. Il m’a moins plu que « Les fausses
innocences » dont j’avais parlé ici .
Je
trouve l’ambiance moins prenante, l’écriture moins concentrée, le secret de
famille qui se révèle peu à peu me paraît plus tortueux, plus improbable, plus
mélo, et donc finalement moins fort que celui qui irriguait « Les fausses
innocences ».
Le
livre est composée des deux parties inégales : la première est le récit
fait par Helena elle-même du drame de sa vie survenu à la fin des années 30. La
seconde beaucoup plus courte réévalue l’histoire du point de vue de son fils
après qu’il ait découvert le manuscrit de sa mère au moment de son décès. Le
basculement introduit est assez extraordinaire : j’étais tout content
lisant la première partie d’avoir deviné bien avant que cela ne soit révélé
quel était le secret empêchant le rapprochement entre Guido et Helena, j’ai
aimé découvrir dans la seconde à quel point la réalité pouvait être différente
de ce que l’on croyait. Je n’en dirais pas plus pour ceux qui veulent lire,
peut-être d’ailleurs en ai-je déjà trop dit…
C’est
là que le livre devient passionnant, dans cette confrontation des deux
versions. Mais justement je dis « passionnant », comme je dirais
« bravo, quel coup habile, quel joli retournement », j’ai admiré, mon
plaisir a été plutôt intellectuel alors que dans « Les fausses
innocences » il a été plus émotionnel, j’ai pu me sentir plus fortement en
empathie avec les personnages. Enfin, je ne sais pas, l’aspect émotionnel a été
présent ici aussi, peut-être est-ce seulement qu’il ne s’est pas attaché à
l’histoire d’Helena qui occupe la plus grande partie du livre mais plutôt à
celle plus concentrée du fils qui réalise qu’il ne connaît rien de sa mère et
qui tente d’en élucider le mystère, qui tente à posteriori de la découvrir.
Se
trouve posée en tout cas une sacrée question pour l’autobiographe : La
vraie vérité, la vérité profonde est-elle dans la réalité des faits ou dans l’image
que l’on s’en construit ? Le plus souvent les deux pans du réel ne sont
pas contradictoires, seulement un peu biaisés l’un par rapport à l’autre.
Qu’ils puissent le devenir violemment, c’est ce que montre l’histoire d’Helena
sous ses deux versions.
« Pour
vivre on a tous besoin d’un petit roman, non ? »… « Nous n’avons
pas besoin de la vérité, Raoul, seulement d’un système qui tienne la route, un
roman, un roman bien ficelé » (p 207)
De
ce livre aussi j’aime la façon dont je l’ai découvert. Voilà un auteur dont je
n’avais jamais entendu parler avant de le découvrir par le biais de
l’excellente Coumarine. La lecture se charge alors d’affects que l’on n’a pas à
l’égard d’un livre choisi un peu au hasard sur la pile d’un libraire au vu
d’une quatrième de couverture ou bien à la suite de critiques élogieuses dans
la presse. Ainsi en est-il aussi pour Julien Green, ce que je connaissais de
lui ne me poussait pas à y mettre le nez, je l’ai fait avec plaisir et me
promet d’y revenir parce que désormais Green pour moi c’est aussi un peu cette
chère Sylvia (d’ailleurs bien silencieuse ces derniers temps).