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Les échos de Valclair
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23 janvier 2006

Le linceul

Par la fenêtre je vois un avion qui passe. Il vole bas, lentement et silencieusement, on dirait qu’il est pratiquement à la hauteur de l’immeuble. Un autre passe derrière lui. C’est tellement étrange ces avions en pleine ville…

Je me précipite sur le balcon. C’est celui de l’immeuble ou habite mon père, une de ces tours qui dominent Paris. Quelqu’un d’autre est avec moi, mais je ne sais pas qui. Il fait nuit, tous les immeubles sont éclairés comme l’avenue à nos pieds où passent des voitures. Les avions se sont éloignés. Il règne un silence énorme, impressionnant, qui fait peur. Toutes les lumières en même temps se sont éteintes. L’obscurité est totale. Je voudrais rentrer dans l’appartement. Je sais qu’il en est de même pour l’autre personne, nous voudrions parler, nous ne le pouvons pas plus que bouger, mais nous nous percevons, nous savons que nous ressentons la même chose, nous savons que tout s’est arrêté, nous savons que les avions silencieux ont lâché leur cargaison létale, nous savons que nous sommes morts. Nous ne sommes pas dans la révolte, nous savons qu’il n’y a plus rien à faire, mais il y a dans cet instant qui menace de durer pour l’éternité une intense charge d’angoisse et de terreur. Nous sommes dans un linceul. Est-ce que ce sera ainsi, la mort, dans la prochaine guerre ?

C’était un cauchemar dur, très court dans la perception de son déroulé, sans ces histoires compliquées et chaotiques imbriquées les unes dans les autres qu’on essaie de se rappeler au matin, juste cette courte séquence mais d’une effrayante présence. Je rêve peu. Enfin, je me souviens peu de mes rêves. Cela dépend des périodes aussi. Disons que je me souviens particulièrement peu de mes rêves en ce moment. Pas très drôle que le seul qui vienne s’offrir à moi soit un tel cauchemar, j’aurais préféré bien sûr un de ces rêves coquins où l’imagination baroque s’en donne à cœur joie et qui viennent parfois rajouter un peu de sel à mes nuits.

Malfaisant coup de téléphone qui m’a réveillé en pleine nuit. Je suis sûr que sinon je ne me serais rappelé de rien. Et bienfaisant en même temps. Mieux vaut savoir ce qui passe dans le circuit. Et puis il y a ce plaisir toujours du réveil après un mauvais rêve, sortir des limbes, bouger la main, ouvrir la bouche, sentir le rêve s’affadir, le rêve auquel on ne croit plus tout à fait mais qui perdure encore pendant un moment dans la conscience comme un angoissant bruit de fond, le sentir qui s’éloigne, pouvoir dire enfin : « Ouf, ce n’était qu’un rêve, je suis vivant, bien vivant… »

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Commentaires
V
Alors ça tu me fais retrouver quelquechose de tout à fait oublié!<br /> Je me demandais ce que j'avais bien pu écrire sous un titre pareil "le linceul", ça ne me rappelait rien du tout. Un rêve donc... Je n'en garde pas le moindre souvenir, à le relire ce ne sont que des mots que je lis, aucune image ne revient, mais c'est la loi du genre je pense, sauf pour les rêves récurrents.<br /> Merci de tes plongées dans mes profondeurs, chère Mabel, ça me fait me retrouver moi-même. Sourire!
M
Il est un rêve que j'ai fait il y a bientôt deux semaines et qui ne cesse de me hanter. Je ne vais pas vous raconter tous mes rêves car je fais partie des chanceux qui se souviennent.<br /> Vous allez rigoler parce que moi aussi j'ai rigolé. <br /> Alors, ça se passait dans un film et j'étais en cavale avec trois voyous dont l'un était Jean-Paul Belmondo. Et devinez quoi? Nous étions amoureux l'un de l'autre. Nous avions peut-être une vingtaine d'années de différence (lui l'âge des ses grands rôles et moi plus jeune aussi qu'aujourd'hui). Bref, nous finissions par nous faire attraper par les flics qui nous avaient attachés à l'arrière d'un pick-up. j'étais dans ses bras, il me tenait serrée contre lui car nous savions que nous serions bientôt séparés. Nous nous aimions quoi! Je me suis demandé pourquoi j'avais fait ce rêve parce que Belmondo ne m'a jamais fait fantasmer plus que ça. Alors, j'ai réfléchis, je me suis laissée me réapproprier les sensations de mon rêve. La différence d'âge, moi dans ces bras, lui qui me protège, l'amour inconditionnel... vous voyez ce que je veux dire?<br /> J'ai compris plusieurs jours plus tard:<br /> Pour que vous compreniez aussi, je vais vous raconter quelque chose. En 1988, je suis allée voir au cinéma "Itinéraire d'un enfant gâté" de claude Lelouche avec... Jean-Paul Belmondo. Je suppose que beaucoup d'entre vous l'ont vu pour les autres, louez-le vite! Dans ce film, il se passe beaucoup de choses et Belmondo qui en est le centre entretient plusieurs types de relations avec plusieurs protagonistes. Il y a une scène où on le voit au cirque avec sa fille qui est jeune adulte. Et je me souviens comme, aussitôt, je me suis dit "c'est un père comme celui-là que j'aurais voulu". Et depuis, je regarde ce film régulièrement parce que non seulement je l'adore mais aussi, je crois, parce que pendant ce temps-là, je peux imaginer qu'il est mon père.<br /> Alors, le rêve s'explique. Puisqu'il ne sera jamais mon père, peut-être pourrait-il être l'homme que j'aime...
S
Maintenant que tu es bien vivant, que pour nous aussi c'est un soulagement ; que tu racontes si bien les cauchemars, fais nous, la prochaine fois, partager un ces rêves coquins :-))
Les échos de Valclair
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