Willy Ronis
Mes pas hier m’ont mené à
l’Hôtel de Ville où j’ai vu l’exposition du photographe Willy Ronis.
Un vrai plaisir. D’abord il
n’y a pas à dire une belle photo noir et blanc, dans un bon tirage, en soi,
c’est beau. Le jeu des lignes et des formes, le contraste des vides et des
pleins, la structure de l’image y apparaissent avec plus de force, de pureté
que dans la photo couleur. Il me semble qu’on est plus facilement conduit au
sens profond de la photo comme si les couleurs, si belles parfois pourtant et
auxquelles désormais on est tellement habituées, détournaient et dispersaient
l’attention en saturant l’espace de trop d’éléments et de trop d’informations.
Et puis les sujets de Ronis
me touchent particulièrement. Pour un amoureux de Paris comme je le suis c’est
toujours émouvant de voir des lieux que l’on connaît, que l’on a vu évoluer,
tels qu’ils étaient quand on était enfant, tels qu’ils étaient même du temps de
la jeunesse de nos parents. Et puis Paris est peuplé, habité de tout son peuple
de petites gens et d’ouvriers, marqué par les luttes, celles de 1936, celles de
la libération, marqué par l’ambiance bonne enfant de ses fêtes, fêtes foraines,
bal popu, fêtes de l’Huma, c’est tout cela que fait revivre Ronis, tout un
Paris disparu.
On comprend que ces photos
aient beaucoup de succès. L’identification est facile. Ce petit gars qui court
en portant son pain à peu de chose près ç’aurait pu être moi.
Certains brocardent un peu
ce genre de photos à cause de leurs sujets trop faciles, d’un « humanisme »
jugé un peu mièvre mais est-ce un mal d’avoir des sujets que tout le monde peut
s’approprier parce que tout le monde peu ou prou s’y retrouve.
J’ai suivi les vidéos dans
l’expo qui présentent des interviews de Ronis. C’est désormais un très vieux monsieur
mais qui parle avec chaleur de son parcours et de sa démarche. On le sent en
sympathie profonde avec les personnes qu’il photographie et c’est cela qui rend
ses images si attachantes.
Les moments les plus
émouvants sont ceux de retrouvailles avec certains de ses anciens
« modèles », modèles sans le savoir, personnes prises en instantané
et qui se sont reconnues et se sont manifestées auprès de lui des années plus
tard. Il a retrouvé par exemple soixante-cinq plus tard cette petite fille que
l’on voit toute fiérote sur les épaules de son père le 14 juillet 1936, c’est
une vieille dame, on assiste à leurs retrouvailles, c’est émouvant.
Sortant de là, j’avais des
envies de photographie pour moi même, je n’avais pas mon appareil avec moi et
je l’ai regretté.