Fatigue
Je suis rentré étrillé du
boulot ce soir.
Mon planning a fait que
contrairement à l’habitude où je travaille à portée de pied de mon domicile
j’avais comme par hasard hier et aujourd'hui deux journées de travail lourdes
et impliquantes en elles- mêmes et situées de surcroît à l’autre bout de Paris.
J’ai donc fait en surplus
d’un horaire déjà chargé une bonne heure de vélo dans chaque sens. Et encore il
faisait très beau, quoique froid et d’un certain côté c’était presque un
plaisir. Mais ce n’était pas la même chose que le vélo promenade des dimanches,
c’était une circulation difficile, tendue, impliquant de louvoyer entre les
bagnoles au milieu des gaz d’échappement, il n’y a pas partout des pistes
cyclables…
Et pourtant ce n’était
qu’une heure de vélo ! Je mesure mon privilège quand je pense à ceux qui
habitent de lointaines banlieues et qui sont contraints quotidiennement,
indépendamment de toute grève, à passer de longues heures dans les transports.
Et je comprends qu’ils puissent enrager à galérer encore plus en ce moment.
Aujourd'hui j’animais une
formation. Je devais avoir douze personnes, je n’en ai eu que six. Je me
doutais bien qu’il y aurait des manquants mais autant c’est très gênant pour la
suite. Je m’étais fait un point d’honneur à être à l’heure par respect pour
ceux qui allaient tenter de venir même si nous n’avons finalement démarrés
qu’avec beaucoup de retard.
Non décidément ça ne colle
plus ces formes de lutte ! Je dis cela indépendamment même de ce pourquoi
les gens se battent et qui mériterait sérieusement d’être questionné, j’avais
dit mon opinion là-dessus déjà ici. Je comprends cela dit tout à fait
l’exaspération des minorités combatives qui portent le mouvement car il y a en
effet dans ce gouvernement un tropisme tellement fort vers les plus riches
qu’il est inévitable de susciter la colère. L’alignement, justifié, des régimes
de retraite ne peut se faire sans réaction violente quand par ailleurs on fait
des cadeaux fiscaux mirifiques et qu’on triple l’argent de poche du président.
Mais cette exaspération je ne peux l’approuver. Ce à quoi elle conduit n’est
plus acceptable. La démocratie dite formelle l’est bien plus que la démocratie
des AG, on a rêvé des soviets, on sait où ils ont conduits.
Pour moi la vraie question
c’est comment se fait-il que ce pays, que cette société n’ait pas été capable
de produire une offre politique telle que Sarko ait pu être battu, comment sa
fait-il que ne puisse s’y structurer des forces capables d’adapter tout en
préservant ou en confortant ce qui doit l’être ?
Je ne me reconnais plus,
mais plus du tout dans les combats de la gauche radicale.
Ça fait des années que c’est
comme ça mais c’est drôle j’ai toujours un peu de mal à l’admettre et à le
dire.
Comme s’il y avait toujours à
difficulté à vraiment faire un deuil pourtant accompli depuis des années.
Comme si j’avais une gêne à m’assumer
comme le social démocrate que je suis.
En tout cas je suis rentré
pompé et un peu déprimé de ces deux journées.
Et, résultat des courses, je
suis resté à la maison alors que j’avais la possibilité d’un sympathique dîner
de blogueurs ce soir, j’aurais bien mieux fait de me secouer pour y aller
plutôt que d’écrire ces mots grise-mine mais je n’ai pas eu le courage de
réenfourcher mon vélo dans la nuit et le froid une heure après être rentré ou
d’affronter les attentes pour avoir de rares métros.
Allez je crois que ça va
être dodo rapido, non sans la lecture d’abord de quelques pages d’un bon livre,
à moins que je ne m’endorme dessus à peine l’aurais-je ouvert.