Où est l'infidélité?
Il y a quelque temps j’ai
commis un acte tout à fait anodin (enfin failli commettre) qui m’interroge mine
de rien sur la notion de fidélité dans le couple d’une façon décalée par
rapport à ce qu’on met habituellement derrière cette notion.
C’était un week-end qui
avait été très chargé pour moi entre visite de mon fils aîné et activités
associatives. J’y avais préservé comme moment de latence, comme moment à moi,
le dimanche après-midi. Il se trouve que j’ai eu la possibilité d’y rencontrer
une amie chère à mon cœur. Nous avons programmé un cinéma ensemble et je me
suis réjoui des moments de discussion et d’échanges tendres qui iraient avec.
Une fois terminée la conversation par messagerie qui avait abouti à cette
décision je me suis senti envahi de sentiments contradictoires, tout heureux de
cette perspective agréable et en même temps troublé, mal à l’aise.
Car Constance de son côté
était « libre » aussi. Nous n’avions pas eu de moments
potentiellement à nous au cours du week-end, elle sortait d’une méchante crève
et ça lui aurait certainement fait plaisir et fait du bien de se laisser
entraîner au cinéma. Je n’ai pu m’empêcher de me dire que j’aurais pu lui
proposer ce moment partagé. Les petites toiles et les conversations qui vont
avec constituent l’un des plaisirs certains que nous aimons encore à partager.
Je peux certes me dédouaner en évoquant les fois nombreuses où nous devions
sortir, où elle m’a dit finalement qu’elle ne préférait pas, qu’elle était
fatiguée ou qu’elle avait trop de choses à faire.
N’empêche. Par mon choix je
signifiais très clairement, je me signifiais à moi-même, vers qui allait mon
cœur, vers qui allait mon envie. J’ai senti avec force la mise en concurrence
des deux relations.
Mon choix d’aller vers l’une
plutôt que vers l’autre, aussi anodin que soit l’événement en lui-même, m’a
paru constituer un accroc, une « trahison » finalement plus
importante dans l’intention à l’éthique d’une vie de couple et aux solidarités
que nous nous devons, que d’autres relations qui ont pu survenir, allant
éventuellement plus loin, mais inscrites dans des moments où elle-même était
occupée ou bien géographiquement à distance, bref où la concurrence ne se
posait pas dans des termes explicites et immédiats.
En clair je veux dire par là
qu’il a pu m’arriver d’avoir des passages à l’acte sexuel qui m’ont paru moins
problématiques, moins signifiants sur la gravité de la détérioration de mon
couple que ce simple et chaste choix de compagne de cinématographe.
La suite de l’histoire est
très « morale » si je puis dire. Notre rendez-vous a finalement
capoté. Je me suis vu, en ne me sentant pas bien fier de moi, proposer à
Constance d’aller voir ce film que j’aurais dû voir avec une autre. Et en effet
il se trouve qu’elle n’a pas voulu venir. Peut-être que c’était aussi bien. Je
ne me serais pas forcément senti à l’aise, accompagné mais version plan bis.
Bien fait, tu n’as que ce que tu mérites dirait un petit dieu de la paix des
ménages (figure mythologique hautement improbable !). J’ai été au cinéma
tout seul, j’ai pris du plaisir au film que j’ai vu (c’était « my
bluberry nights », si vous voulez savoir), mais je n’ai pas manqué de
l’accompagner de quelques réflexions et rêveries sur le sens de ces
mini-évènements, qui continuent à planer en moi puisque les voici écrites...
Et mises en ligne ! Non
sans être restées quelques jours dans le sas du « publierais-je ?, ne
publierais-je pas ? »…