Figuration narrative
J’ai vu récemment cette
exposition au Grand Palais, découvrant ainsi un mouvement artistique que je
connaissais très peu pour ne pas dire pas du tout, même si j’avais croisé
certaines de ses images emblématiques.
J’ai aimé voir ressurgir au
travers d’eux l’époque profondément contestataire pendant laquelle ce courant a
été actif, le tournant des années 60. Cette exposition prend sa place
finalement dans les évocations très (trop ?) à la mode de mai 68, à
condition de ne pas le voir dans le temps court de l’événement mais dans le
moment historique plus large qui l’encadre. Certains peintres étaient des
militants patentés (notamment ceux qui sont intervenus à l’atelier populaire
des beaux arts et qui ont contribué à la floraison des affiches de mai),
d’autres pas du tout mais ils ont tous le souci de dire quelquechose de leur
époque dans une perspective critique et contestataire. L’expo fait bien ressentir
« l’énergie de l’époque ».
Ce qui est intéressant c’est
la variété des solutions esthétique choisies tout en s’inscrivant dans un même
courant. Certaines pièces m’ont bien plu, d’autres m’ont laissé totalement
indifférentes.
Par exemple j’ai
esthétiquement beaucoup aimé les rouges de Fromanger.
J’ai trouvé de la puissance
à certaines toiles comme « La bataille du riz » d’Aillaud ou
« Les silhouettes affinées » de Rancillac, pour prendre deux exemples
esthétiquement totalement différents.
J’ai trouvé amusant et
stimulant les chocs provoqués par certaines confrontations, notamment chez Erro,
à partir de citations de classiques ou dans les intérieurs américains. J’ai
trouvé que Dali en fou du roi à la Vélasquez ce n'était pas mal vu.
Tout ça néanmoins est resté
assez intellectuel et dans l’ensemble cette expo que j’ai pourtant été très
content de voir ne m’a pas emballé ou transporté. Je me sens assez en accord
avec ce qu’a dit Fuligineuse là-dessus. Comme elle je n’ai pas été ému par
cette peinture. Or j’aime être ému, j’aime que ce que je vois face écho au
profond de moi. Je suis assez réticent vis à vis de l’art contemporain
précisément parce que je le trouve trop conceptuel en général. J’ai besoin
d’une vibration, que celle-ci vienne du choc esthétique ou de ce que je ressens
en profondeur de la personne de l’artiste.
J’avais parcouru la note de Fuli au moment où elle l’a écrite mais n’en avais pas lu par contre les commentaires, ce que je viens de faire. Je n’aime pas trop la tonalité avec laquelle s’y manifestent certaines opinions qui m’ont parues marquées d’intolérance. L’art naturellement exprime toujours quelque chose de son temps et il est juste de l’analyser de ce point de vue. Mais dès qu’on commence à poser qu’il y aurait des bons ou des mauvais en fonction de critères idéologiques ou que l'émotion serait à priori suspecte, là je frémis. Ça rappelle trop de mauvais souvenirs. C’est curieux car il y a eu quelque chose de ce débat sur le terrain du cinéma tout récemment autour du film « Un conte de Noël » à travers deux articles du Monde qui se sont répondus l’un analysant le film de Desplechin comme dangereusement réactionnaire, l’autre réagissant vigoureusement à cette opinion : c’est naturellement du second que je me sens bien plus proche.