La crise
Elle est impressionnante
tout de même cette crise financière !
Je la regarde passer sans
m’en sentir plus que ça concerné et je m’en étonne. Elle est le signe que
décidément le capitalisme dans sa version financière dérégulée est un système
porteur de crises majeures ce dont certes je ne doutais pas mais sans imaginer
qu’elles puissent se traduire de cette façon là.
Je ne me fais aucun souci
pour les boursicoteurs, pas plus que pour les jeunes aux furieux appétits de
fric qui se sont précipités vers les postes de traders aux rémunérations
indécentes (et je suis heureux de penser que la côte que ce type de fonction
avait dans les écoles d’ingénieurs va sans doute en prendre un coup au profit
des vrais métiers d’ingénieurs). Mais la crise financière peut-être matrice de
beaucoup d’autres et avoir des conséquences dramatiques dans d’autres secteurs
de l’économie.
Il est un peu triste de voir
que les dénonciations, les mobilisations semblaient totalement inopérantes à
faire bouger quoi que ce soit dans le système. Là par contre la panique qu’il
entraîne chez les dirigeants semble faire bouger les lignes et remettre à
l’ordre du jour la nécessité d’une certaine régulation du système.
Il est piquant de voir les
thuriféraires du libéralisme le plus débridé faire appel à l’état pour garantir
ce qui peut l’être. Comme souvent un dessin dit bien des choses en un trait de
plume. Le Plantu qui montrait une troupe de patrons manifestant comme de
vulgaires cégétistes sous une banderole « nationalisez nos banques »
était fort bien vu.
Peut-être de cela
sortira-t-il quelque chose de bon. Je n’en suis plus à remettre en cause un
fonctionnement de l’économie basée principalement sur les lois du marché mais
encore faut-il que celui-ci soit un minimum régulé, un minimum encadré, que les
états dotés d’une puissance publique significative soit en mesure de participer
au jeu et d’assurer que les besoins essentiels des populations soient pris en
compte. Bref un capitalisme régulé. Finalement Stauss-Kahn n’est peut-être pas si
mal là où il est.
Du temps où je professais le
marxisme, je me serais emparé d’un tel événement comme une preuve de la
faillite généralisée du capitalisme. J’en aurais fait des gorges chaudes
triomphantes, sans trop me soucier de la situation concrète des gens jetés hors
de leur logement ni des conséquences humaines de l’aggravation de la crise.
Sans doute même m’en serais-je réjoui, voyant dans la crise le plus sûr ferment
de révolutions à venir.
Bien sûr il est tout à fait
positif que ce genre de vieille lune ait été balayée par l’histoire. Mais de là
à se retrouver complètement déconcerné comme je le suis il y a un trop grand
pas qu’au cours des années j’ai fini par franchir. Je me sens ailleurs,
totalement. C’est comme si je m’en lavais les mains de tout ça, comme si je
renonçais à peser, ne fut-ce qu’infinitésimalement, sur la société sauf par
délégation en votant lorsque j’y suis convié. Tout ça pour ne penser qu’à mon
petit train-train, à mes petites interrogations égotistes, à mes petites
écritures peu ou prou nombrilistes (car encore, comme dirait Eva, s’il
s’agissait d’écrire vraiment !). Je trouve ça un peu triste et ne peux
m’empêcher d’en ressentir un peu de culpabilité mais bon, c’est comme ça, je ne
me sens pas en capacité de faire autrement.