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Les échos de Valclair
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24 novembre 2008

Cinéma et cinéma

Ce week-end où je disposais de tout mon temps et de toute ma liberté puisque j’étais seul, et où, de surcroît, le temps a été presque continûment détestable ne poussant pas à la promenade, j’ai amplement profité des écrans parisiens.

J’ai vu trois films, tous les trois dignes d’intérêt, tous les trois donnant du plaisir, à des niveaux différents. L’extrême proximité à laquelle je les ai vus me fait sauter aux yeux cette évidence : il y a cinéma et cinéma, tous les films ne jouent pas dans la même catégorie.

J’ai vu « La très, très grande entreprise », c’est un régal ce film, bien rythmé, bien interprété, on passe un excellent moment, on rit de bon cœur, on suit avec jubilation les exploits d’une sympathique bande de Robin des bois modernes, décidés à pénétrer au cœur d’une multinationale moderne pour réunir les preuves de son comportement scandaleux.

J’ai vu « les grandes personnes », très agréable film aussi, drôle aussi, enlevé, qui, le temps d’une semaine de vacances sur une île suédoise, réunit une jeune fille en plein éveil sensuel, son père intello légèrement fantasque et coincé, leur logeuse et une amie française de celle-ci, mettant joyeusement les cœurs en mouvement et, derrière la légèreté du propos, aidant les personnages à devenir peut-être de vraies « grandes personnes ».

Et j’ai vu pour finir « Two lovers » de James Gray. Et là on change de dimension. Immédiatement dès les premières images c’est autre chose. Chaque image, chaque plan, le rythme de leur composition, la musique qui les accompagne, tout d’emblée est chargé d’une force, d’une intensité formidable. On est plongé dans les ambiances des mondes où la caméra nous conduit, dans la vérité de personnages qui sont à la fois extrêmement présents tout en gardant une part d’insondable mystère, dans les rebondissements d’une histoire amoureuse hautement improbable mais que le talent du cinéaste parvient à rendre parfaitement recevable, celle de cet homme écartelé entre deux femmes, deux figures de l’amour, celle du mariage raisonnable et celle de l’envolée dans la passion. Le film se charge de profondeur et d’épaisseur aussi car chaque détail renvoie à de multiples dimensions, psychologiques, familiales, sociales, bien au-delà de l’histoire qui est racontée. Le personnage central, celui d’un jeune homme psychologiquement fragile, revenu vivre dans le cocon de sa famille de petits commerçants juifs new-yorkais après une rupture sentimentale et un épisode psychiatrique est incarné d’une façon époustouflante par Joaquin Phoenix : il a une façon de faire ressentir le trouble profond du personnage dans les mimiques, dans les mouvements du corps, dans sa façon même de marcher, presque en déséquilibre, qui est extraordinaire.

J’ai vu deux jolis films et j’ai vu le film d’un grand cinéaste, avec sa patte propre, son style, son univers extrêmement prégnant.

Le plaisir pris ne se compare pas. Il n’est pas forcément moindre dans les jolis films. Il pourrait même être à la limite supérieur. Un peu comme on pourrait prendre plus de plaisir à la lecture enlevée de cinquante pages d’un joli roman bien tourné qu’à cinquante pages de Proust. (Je ne dis pas non plus que Gray, c’est Proust, c’est juste histoire de faire comprendre ce que je veux dire !)

Et cela encore une fois me ramène au côté un peu absurde du jeu des prix littéraires ou des palmarès et palmes cinématographiques. Je m’amusais à faire dans Télérama le classement de mes films 2008, comme le magazine y invite chaque année en fin novembre, j’ai laissé tomber, cette expérience de ces trois films vus dans un mouchoir de poche temporel m’indique assez pourquoi.

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Commentaires
D
Bonjour Valclair, l'expression "mouchoir de poche temporel" est très jolie. Comme j'ai déjà fait un billet sur "très très grande entreprise" et "Two lovers", je parlerai des "grandes personnes" qui en y repensant m'a laissée quelques souvenirs. Le film oscille entre comédie et "presque" tragédie. Darroussin en père poule est touchant. La jeune fille m'a fait penser à Salomé Stévenin. Elle a la même graine de talent. Ce coin de Suède donne envie d'y aller. Seule la fin m'a laissée sur ma faim (si je puis dire). Et merci pour tous tes commentaires sur mon blog.
V
Ah le temps, le temps, moi ce sont les livres à lire qui s'accumulent sans que je sache par où commencer et les blogs ne cessent de me donner de nouvelles envies...<br /> Mais toi Telle tu trouves le temps aussi de délicieuses cousettes. Peut-être pas mal les cousettes en ce moment... Il faut un temps pour tout.<br /> En tout cas je suis content si mes notes donnent envie. Et je suis ravi Elsa que l'envie ait été si vite suivi d'effet et que le film t'ait plu. Tout à fait d'accord avec toi aussi sur la qualité avec laquelle les lieux sont filmés que ce soit les intérieurs des appartements ou la ville de New York, les lieux parlent, c'est un point qui m'avait frappé et que j'aurais voulu souligner aussi dans mon billet.
T
Fauvette, je t'en donne et toi tu me délivres une autorisation de sortie et on y va ensemble avant de revenir donner notre avis à Valclair, d'accord ?<br /> <br /> J'aurais aimé parler avec toi, Valclair d'Entre les murs, je n'ai même pas pu y aller. J'enrage.<br /> <br /> En tout cas, les trois donnent envie à te lire !
F
Je n'ai pas vu le film de Jolivet (pas encore), et ai très envie de voir Two lovers, vite du temps de libre svp !
E
Je suis allée voir Two lovers hier soir, film magnifique, je confirme. On finit par être en totale empathie avec cet homme si mal dans sa peau. Les acteurs sont tous formidables. J'ai été un peu surprise de retrouver Isabella Rossellini en matrone ressemblant beaucoup à sa mère, du coup, et jouant de manière tout aussi subtile. J'ai aussi aimé la façon dont New York est filmée, caméra à l'épaule.
Les échos de Valclair
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