Un peu de légereté
Hier soir Constance et moi
avons été voir « Ensemble c’est tout ». C’est vraiment un film
plaisant qui ne bouleverse pas certes l’histoire du cinéma ni n’ouvre des
abîmes d’émotions mais c’est un film doux, tendre, qui fait gentiment rire et
rêver, qui parle d’amitié et d’amour, en transcendant doucettement les
pesanteurs sociales ou psychologiques des personnages, les acteurs sont
excellents, Audrey Tautou est délicieuse.
On s’est dit qu’on avait
besoin d’un film comme ça, qu’on se prendrait bien ce petit bol de légèreté
roborative avant une soirée qui risque d’être coup de massue.
Apparemment l’effet du débat
ne semble pas être de nature à inverser les choses. Au contraire même, il
semble contribuer à creuser l’écart. J’en avais bien senti le risque sur le
moment. Lors de la « saine colère » j’avais manifesté mes doutes
auprès des amis avec qui nous regardions et qui eux baignaient dans
l’enthousiasme. Comme eux pourtant j’étais ravi, ravi de la voir cogner (elle y
va, elle a du culot, elle ne s’en laisse pas conter, sacrée femme !), ravi
de l’ascendant psychologique qu’elle avait su prendre (elle, le regardant sans
discontinuer, l’assassinant du regard, lui la fuyant, se réfugiant du côté des
journalistes). Je continue à croire qu’il fallait qu’elle se montre capable de
ça, peut-être l’a-t-elle fait un peu trop. Et je m’interrogeais sur l’effet sur
l’électeur moyen : à coup sûr ça allait faire plaisir chez ceux qui lui
étaient acquis, renforcer leur détermination, gagner des votes chez des
personnes sensibles à l’émotion mais ça risquait aussi d’en faire perdre en
effrayant, parmi ceux qui étaient dans le doute ou tout simplement plus à
distance de l’aspect un peu passionnel qu’a pris la campagne. Est-ce que ça
allait faire perdre plus de voix d’un côté qu’en gagner de l’autre ? Il
semble bien que oui.
Les sondages quoiqu’on dise
ne se trompent pas tant que ça. Ils sont un instantané à un moment. En 2002 ils
avaient bien vu les courbes de Jospin et de Le Pen se rapprocher
dangereusement. Leur lecture n’a de sens qu’en tendance, pris dans leur
évolution, et là force est de constater que la tendance est mauvaise.
L’improbable est-il
impossible ? On va dire que non. Avec quelques conjonctions
favorables : au moment d’aller voter ou pas justement, qu’il y ait des
électeurs sarkosistes moins mobilisés parce que croyant l’affaire pliée, que
les électeurs de Le Pen soient très abstentionnistes, que certains des
bayroutistes qui le soutiennent mais qui voudraient éviter qu’il ne soit trop
bien élu préfèrent eux aussi l’abstention, qu’il y ait une mobilisation
absolument sans faille de toute la gauche dans toute ses composantes… On peut
rêver. Tout ça ferait vraiment beaucoup de conjonctions favorables. Mais ce
n’est pas impossible, rien n’est jamais impossible tant que le vote n’a pas eu
lieu.
Alors allons-y vaillamment…
Et puis de toute façon il
n’est pas indifférent pour la suite que ce soit une dégelée du type 55/45 dont
parlent certains derniers sondages ou un score plus serré voire très serré.
En attendant je vous mets le minois de Miss Tautou pour tenter de garder au cœur un peu de cette légèreté et cette belle idée de la possibilité de « l’être ensemble » malgré les différences.