Un marathon
Plusieurs de mes blogamis
parmi les plus proches ont marathonné ces derniers jours sur une initiative d'Alain. Je n’avais absolument
pas les disponibilités pour m’engager. Mais plus profondément je ne voulais pas
me lancer sur un nouveau terrain d’écriture, occasion d’une dispersion
supplémentaire, j’ai déjà assez de mal à « tenir » mes autres
écritures (mon blog avec tout ce que je voudrais y mettre, mes ricochets). Mais
j’ai regardé faire non sans un certain regret, non sans une certaine envie. Car
il y avait aussi dans l’activité commune à laquelle les participants se
livraient une aventure relationnelle qui aurait été dans la continuité de
relations soit individuelles, soit déjà inscrites dans des rencontres de groupe
que j’entretiens avec certain(e)s. Ça c’est un peu « l’appel de la
blogobulle », comme un désir, comme un fantasme, de tout appréhender, de
ne rien laisser échapper de ce qui s’y passe…
J’étais très frustré en tout
cas de ne pouvoir aller lire ce qui avait été écrit. Une méchante demande
d’identification m’empêchait d’y accéder. Mais ce matin c’était débloqué, j’ai
pu donc aller aux textes, j’ai pu aller lire les marathoniens. Je ne l’ai pas
fait facilement, j’étais au bureau et assez lourdement chargé en travail mais
entre deux rendez-vous j’ai lu en diagonale puis imprimé une partie des textes,
j’ai ramené tout ça ce soir à la maison, et paisiblement, sur ma terrasse, tout
à l’heure, je les ai dégustés.
Il y a de vraiment beaux
textes, souvent émotionnellement très forts. Ils sont divers non tant dans leur
sujet (la part d’écriture de soi y est très dominante) que dans leur façon
d’appréhender celle-ci, à travers les fulgurances du ressenti ou à travers la
volonté d’exposition claire et d’explicitation par exemple. Mais au-delà du
résultat on sent combien l’expérience en elle-même a été enrichissante pour les
participants.
Un marathon de ce type
finalement se rapproche assez d’un atelier d’écriture. Il y a ce qu’induit le
rythme auquel on se soumet : on se met en condition, on « entre en
écriture », on s’oblige à se concentrer et à s’abstraire en partie au
moins du monde environnant pendant un temps suffisamment long. Certes on écrit
seul mais porté néanmoins par le groupe des écrivants-lecteurs, des
interactions peuvent se créer, susceptibles de dynamiser l’écriture. Bien sûr
ce n’est pas tout à fait comme dans un atelier « présentiel », on
n’est pas rivé à son ordinateur ou à son cahier, il n’y a pas la quasi
« clôture » d’un lieu comme Hurtebise par exemple. N’empêche, je
pense qu’on est beaucoup plus en situation de produire intensément et surtout
peut-être de produire profondément, en laissant monter des parts cachées de
soi, que dans l’écriture en liberté de nos blogs respectifs ou même dans des
écritures sous consigne mais dans un cadre temporel plus lâche comme sur
Paroles plurielles par exemple.
Avant j’étais réticent aux
ateliers d’écriture. Je n’y croyais pas, pour moi en tout cas. J’avais
l’impression de ne pouvoir écrire que selon mon tempo, au moment où je m’y
sentais prêt, je m’imaginais incapable d’écrire sur commande. La première
expérience que j’en ai eu, à Hurtebise justement, m’a prouvé le contraire. Les
contraintes de consignes et de temps ne sont pas paralysantes mais
déclencheuses au contraire. J’avais la même réticence vis à vis d’une
expérience comme un marathon. Ce que je perçois de l’expérience des
marathoniens à travers leurs textes comme à travers leurs réactions
enthousiastes me prouve que comme les ateliers ils sont également fortement
déclencheurs.
Bref, la prochaine fois, je crois
que je tâcherai d’en être…