Souci de riche
Dans la semaine un peu folle
qui vient de s’écouler, où se sont bousculées des contraintes professionnelles
particulièrement lourdes, où j’ai en plus colloqué puis participé à des
activités associatives pendant tout le week-end, s’ajoutait aussi une
préoccupation nouvelle pour moi et entraînant un stress tout particulier.
Pour la première fois j’ai
fait une déclaration et un chèque pour l’Impôt de Solidarité sur la Fortune…
Cela fait des années, en
raison de l’envolée des prix de l’immobilier parisien que je sens que ça vient
et que je remets à plus tard. Jamais je ne m’y étais penché de près comme je me
suis senti obligé de le faire cette année, interrogeant les agences
immobilières, regardant les tarifs pratiqués et je dois dire que les prix
dépassent largement ce que j’imaginais. Je me suis arraché les cheveux entre
volonté d’être réaliste et juste et volonté de ne pas payer plus que je ne
dois.
Je ne suis pas hostile par
principe à cet impôt. Je me rends compte à quel point disposer d’un grand
appartement sympa à Paris que j’ai eu la chance de pouvoir acheter il y a plus de
vingt ans quand les prix n’avaient rien à voir, dans un quartier qui n’était
pas à la mode comme il l’est devenu et grâce aussi, je ne l’oublie jamais, à
une part d’apport venu de ma famille. A cela se sont ajoutés quelques biens
annexes issus de petits héritages venus ensuite de mes grands parents puis de
ma mère comme d’une petite épargne que j’ai constitué, sachant que je partirai
à la retraite dès que je pourrai et sans avoir, loin de là, la totalité de mes
annuités. Oui, je suis un privilégié. Je me le dis chaque matin en entendant le type qui annonce les temps de trajet dans les embouteillages, moi qui vais à mon bureau et dans les cinés à pied ou en vélo. Et en même temps, dans mon mode de vie,
dans mes revenus, je ne me sens nullement riche et ça me fait drôle et me met
mal à l’aise de basculer dans ce monde des assujettis à l’ISF. J’ai eu du mal à
le faire ce chèque quand même ! presque un mois du salaire de ma femme ou
une grosse moitié du mien, c’est dur là où ça passe ! Avec en plus
l’angoisse qu’on vienne nous dire de payer rétroactivement quelques années. Bon,
on n’en mourra pas. Nous ne serons jamais à la rue. Nous n’aurons jamais faim.
Nous continuerons à pouvoir payer les études prolongées de nos garçons, bien
formatés pour s’adapter au système des grandes écoles, lesquelles leur
permettront d’être assurés d’emplois correctement rémunérés. La reproduction ce
n’est pas un vain mot !
Mais, ce qui me choque
vraiment, c’est d’avoir entendu ce matin à la radio dire que l’ISF, au moment
même où moi-même je commence à payer (et d’autres de mes amis parisiens qui
comme moi s’y sont décidés cette année), rapportera moins à l’état à cause du
fameux paquet fiscal. C’est à d’autres riches que ça s’adresse tout ça, à de
vrais riches, à de bien plus riches qui sans parler de ceux qui s’expatrient
carrément à l’étranger, combinent toutes sortes de solutions avec leurs
conseillers fiscaux pour payer moins. Et ça, je trouve que c’est scandaleux,
dégueulasse.
Mais j’ai eu envie de faire
ce billet aussi parce que ce genre de thème est totalement absent de nos blogs
et plus largement de nos conversations à l’extérieur de notre cadre familial
étroit. Sauf à se plaindre qu’on n’en a pas assez, on ne parle pas
d’argent ! Dire que l’on a en a, combien on en a, c’est un secret mieux
gardé que celui des alcôves. Ce sont des sujets jamais abordés avec des
collègues, dans les tablées d’amis ni même dans les relations amicales plus
intimes. Etrange tabou sur quelquechose qui pourtant ne touche en rien à
l’intime. Il est plus facile de parler de ses peines de cœur ou de ses
galipettes que de sa cassette !