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Les échos de Valclair
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1 décembre 2008

Kafkaïen!

J’ai dû relire deux fois l’article du Monde samedi à propos de l’interpellation musclée de Vittorio de Filipis. Cet ex-directeur de publication de Libé s’est fait cueillir chez lui à l’aube par la police, il s’est fait menotter et embarquer manu militari puis il a eu droit à deux fouilles successives au corps et à quelques insultes. Tout ça comme suite à des plaintes en diffamation déposées par le Pdg de Free, pour des articles ne lui ayant pas plu et - c’est encore plus extravagant – pour des commentaires déposés par un internaute sur le site de Libération à l’époque où Filipis en était directeur !

L’histoire m’a paru tellement invraisemblable que j’ai relu l’article deux fois en me disant : Mais c’est pas possible, je n’y crois pas .

Mais si apparemment il faut y croire !

Est-ce à ça que servent les moyens de la justice dont on dit assez la grande insuffisance ?

Est-ce à ça que servent les moyens de la police ?

Qu’est ce qui peut expliquer une intervention aussi délirante ?

Est-ce le résultat d’un excès de zèle d’une juge d’instruction ou des fonctionnaires de police qui ont pris le relais ?

Va-t-il y avoir des sanctions pour cet excès de zèle aussi rapidement qu’il y en a eu pour son pendant inversé, l’insuffisance de zèle supposée des forces de police lors de l’occupation de la villa corse de l’ami du président ?

Excès de zèle n’est même le terme qui convient : l’interpellation même si elle avait été effectuée d’une façon civilisée et respectueuse pour la personne en cause paraît totalement inadaptée, hors de propos, pour une affaire de ce type. La délicieuse Dati vient, à ce que je vois, de justifier l’interpellation par la non réponse du journaliste à de précédentes convocations qui lui auraient été notifiées. Il y a débat sur le sujet avec les avocats de Libération. Mais quoiqu’il en soit et indépendamment du « droit » éventuel que la juge aurait eu de délivrer ce mandat d’amener, on aurait pu supposer que le simple bon sens lui fasse rechercher d’autres moyens de contact.

Et si ça se passe comme ça pour un journaliste, ayant par définition les moyens de faire du tapage médiatique, on peut imaginer à quels excès peuvent se laisser aller certains fonctionnaires de police avec des sans-voix, au fin fond des quartiers et des cités.

Faudrait-il croire alors que ce soit un peu plus que des dérapages, une volonté de créer un certain climat ?

Ça me parait de tellement mauvaise politique que j’ai du mal à le croire.

Et pourtant, je crains qu’il ne faille se rendre à l’évidence.

On a manifestement de plus en plus une police et une justice instrumentalisés et, de surcroît, instrumentalisés n’importe comment.

C’est assez effrayant !

On me dira peut-être qu’il y a plus grave : les sans domicile qui claquent, la crise qui s’approfondit chez nous et encore plus hors de chez nous, les populations dramatiquement fragilisées tout autour du monde, la terre qui se porte mal.

On me dira, ce n’est qu’un éphiphénomène, ça va faire causer les bobos de gauche, d’ailleurs ça marche, la preuve ce que je suis en train d’écrire, et pendant ce temps on ne parle pas du reste.

On me dira que ce n’est pas bien intéressant de se fendre d’un billet sur un sujet comme celui-ci qui voit et verra se manifester une indignation largement partagée.

On me dira ce qu’on veut, je ne peux m’empêcher de pousser mon coup de gueule.

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Commentaires
F
Tu as bien raison de pousser ton coup de gueule, car franchement bobo ou pas, il n'y aucune raison d'agir ainsi.<br /> Comme toi je ne comprenais rien à ce que je lisais samedi, j'ai même cru à un canular !<br /> Et si tu as suivi l'affaire depuis samedi, tu as dû voir comment l'affaire a tourné...
V
J'avais lu Eolas, car sur un sujet comme ça je me doutais bien qu'il aurait des choses intéressantes à dire. C'est bien pourquoi je soulignais que même si "en droit" l'interpellation était possible on pouvait imaginer que le bon sens aurait dû conduire à l'éviter.<br /> Et indépendamment de ça il y a la manière et là Eolas pointe plusieurs dysfonctionnements et comportements pour le coup illégaux. <br /> Et en effet on imagine ce que c'est pour le pékin lambda et d'autant plus s'il est basané!
A
le problème, c'est que, globalement, il y a eu à proprement parler aucun dérapage... Si ce n'est à l'origine le petit orgueil blessé d'une juge à qui on n'a pas obéi illico presto...<br /> <br /> Le pire c'est que Dati à raison....<br /> Ce n'est là qu'une pratique TRES ordinaire et quotidienne de la police qui exécute une décision de juge....<br /> ça peut t'arriver demain matin Valclair....<br /> <br /> Comme l'écrit Me Eolas (journal d'un avocat) qui fait par ailleurs une analyse juridique très complète de ce cas :<br /> <br /> "Cette affaire, frappant un journaliste, (...) va attirer un temps l'attention des médias sur ce scandale quotidien qui ne provoque qu'indifférence parce que d'habitude, le monsieur qui tousse avec son slip autour des chevilles, il s'appelle Mohamed, ou il a une sale tête."<br /> <br /> http://maitre-eolas.fr/2008/11/29/1227-reportage-de-terrain#tb<br /> <br /> Ainsi en est-il de notre belle démocratie française...
Les échos de Valclair
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