Affaire Garfieldd suite
Et
bien donc la fin plutôt pessimiste de ma note d’hier se révèle inexacte. Ils
ont reculé. Le ministre a pondu un communiqué indiquant que la sanction serait
revue (« au vu de son dossier, le ministre arrêtera prochainement une
décision mieux proportionnée à la faute commise par ce fonctionnaire »).
C’est bien se déjuger, reconnaître qu’il y a eu une erreur. Ce n’est pas une
erreur de hasard car la commission disposait évidemment de l’ensemble des
éléments du dossier, elle avait pris sa décision en connaissance de cause,
pensant sans doute par là faire preuve d’une sévérité bien vue en ces temps
où il faut faire assaut d’activisme dans le climat sécuritaire ambiant (sur le thème: y a pas
que Sarko qui est capable d’agir).
D’un
côté ce recul paraît évident tant la disproportion était flagrante. Il faut
maintenant voir la sanction qui sera effectivement prise. Il faut vivement
souhaiter qu’il ne s’agisse pas du déplacement d’office. Garfieldd en effet
semblait être un proviseur auquel non seulement il n’est professionnellement
rien reproché mais qui en plus paraissait particulièrement dynamique et investi
dans la vie de son établissement, largement apprécié par l’équipe éducative et
les élèves. (enfin ça je n’en sais rien de façon sûre, c’est simplement mon
impression à la lecture de commentaires de soutien issus de personnels de son
établissement, parfois les choses sont moins simples, il y a parfois des
établissements clivés, avec des très pour et des très contre). Le déplacement
d’office peut se justifier quand le problème posé crée un trouble dans le lieu
même où le fonctionnaire est affecté et en bloque le fonctionnement ce qui ne
semble pas le cas ici.
Ce
recul a évidemment à voir avec la mobilisation de la blogosphère (mais pas
seulement, le syndicat des chefs d’établissement s’est également mobilisé).
Bien sûr j’avais lu des choses sur les effets de ce nouveau média, sur le poids
que pouvait prendre cette expression citoyenne décentralisée capable de se
développer à grande vitesse, sur l’interaction que celle-ci pouvait avoir avec
les grands médias. Mais je n’y avais jamais personnellement participé, (sauf à appeler à voter oui à la constitution européenne avec le succès que l'on sait). Cela me
fait plaisir, minuscule blogueur parmi des centaines d’autres, de me sentir
cette fois partie prenante et d’avoir le sentiment que cela a servi à
quelquechose.
C’est
une leçon de choses. On a vu par exemple la reprise de l’affaire dans les
médias nationaux ce qui n’aurait pas été le cas sans cela, on a même vu Libé
qui a su modifier, au vu des éléments complémentaires fournis par les
blogueurs, sa première appréciation trop hâtive de l’affaire basée au départ
sur les seuls éléments issus de l’administration. C’est une expression nouvelle
de démocratie qui est en marche. Bien sûr elle peut avoir ses effets pervers,
le développement en traînée de poudre de rumeurs infondées, je crois qu’il y a
eu certains phénomènes de ce type aux USA, cependant je ne pense pas que le
risque soit très fort puisque d’autres blogueurs ayant des contre informations
monteraient alors immédiatement au créneau et contribueraient à rétablir la
vérité.
Tout
n’est pas simple cependant. J’ai ouvert la pétition. J’ai hésité puis je ne
l’ai pas signée. Je me disais que ça n’aurait eu vraiment de sens que sous mon
nom et es qualités en tant que (petit) cadre de l’éducation nationale. Mais
cela je ne l’ai pas voulu. Non pas par crainte d’une réaction de mes
supérieurs. Mais à cause du risque par ce biais de permettre des rapprochements
et de me faire reconnaître par certains dans mon milieu professionnel. Je ne
suis pas gêné de laisser mon anonymat se déliter dans mon monde blogosphérien,
amical ou d’écriture, par contre je ne voudrais surtout pas que ce soit le cas
dans mon monde professionnel. C’est cela aussi que me rappelle l’affaire
Garfieldd. Saucissonnons nos vies, à notre grand dam sans doute, mais c’est
nécessaire hélas.
Je
vais publier ça dans la catégorie « écriture, diarisme et
blogosphère » qui correspond le mieux à la teneur de ce billet mais j’ai
hésité avec la catégorie « vie du monde ». Car j’ai le sentiment
aujourd'hui que le petit monde clos de nos écritures égocentrées rejoint des questions
plus larges de la vie sociale et démocratique de notre société.