Une femme sexuelle
Je visitais récemment une exposition...
Parmi les visiteurs passe
une femme assez belle, plutôt grande, svelte, vêtue d’un jean et d’un débardeur
assez échancré laissant ses épaules dénudées, son corps est assez fortement
cambré, et ses seins se devinent assez gaillardement pointés sous son vêtement.
Sa silhouette est très juvénile comme son look et la façon dont elle est
habillée mais à regarder son visage, on voit qu’elle n’est pas si jeune,
quarantaine avancée voire jeune cinquantaine. Cette femme a en elle quelque
chose de violemment sexuel. Je l’observe du coin de l’œil avec comme toujours
dans ces cas là une certaine fascination. Elle est assez belle certes mais sans
rien d’exceptionnel. Alors d’où cela vient-il ? Quel est ce mystère ?
Qu’est ce qui lui confère cette aura particulière ?
Elle est accompagné d’un
homme, un grand et beau brun qui paraît plutôt plus jeune qu’elle. Ils semblent
très amoureux. Ils s’éloignent parfois l’un de l’autre au cours de la visite
mais se rapprochent aussi par moments, se tiennent alors serrés l’un contre
l’autre ou s’embrassent. A un moment ils se posent sur des sièges, l’homme lui
dit quelquechose à l’oreille et la femme se met à rire d’un grand rire sonore
qu’elle ne se préoccupe pas de tenter de calmer. Je n’imagine pas qu’ils soient
mari et femme ou compagnons au long cours, ils ne peuvent être qu’amants, ils
portent en eux la vivacité d’un désir neuf ou à tout le moins récent.
J’aime assez ce genre de
vision de hasard et les imaginations qu’elles déclenchent en moi. J’aime les
écrire dans mon journal un peu de la même façon que j’aime à l’occasion écrire
des nouvelles érotiques. En les écrivant je les arrête et leur confère un éclat
peut-être plus brillant que dans la réalité même. Et je tente d’en retenir
l’image, pour la collectionner, pour avoir le plaisir plus tard de la
réactiver.
Je suis un homme de regards.
Je sais que c’est ce qui fait de moi ce promeneur attentif, capable de capter
ce qui passe d’une image ou d’une ambiance, capable de la poser dans les mots
et capable aussi parfois de laisser mon imagination s’envoler à partir d’elle,
indépendamment de toute éventuelle connotation sexuelle. Mais cette tension du
regard s’accentue devant des scènes chargées d’érotisme (ou auxquelles moi-même
je me plais à conférer une part d’érotisme). C’est mon petit côté voyeur !
Et je sais qu’il a un certain effet pervers, en contribuant à nourrir des
frustrations car le regard n’est pas tout et ne comble pas ce qui me manque,
mais ce n’est pas pour autant qu’il me faudrait bouder ces plaisirs légers de
l’œil et de l’imagination.