Le syndrome de l'huitre
Je ne suis pas vraiment au
top ces jours-ci. Quand j’écris ça, avec mon sens aigu de la litote, c’est que
je me sens plutôt dans le trou !
Pourquoi ? Va savoir…
Un mélange bizarre où les éléments négatifs se renforcent les uns les autres,
donnant à des choses dérisoires un poids soudain démesuré.
Il y a un malaise dans ma
vie professionnelle lié entre autres aux bornes que je me suis assignées mais
qui me posent souci et vis-à-vis desquelles encore j’hésite ; il y a une maladie
grave qui affecte un proche découverte tout récemment et qui fait surgir des
angoisses dans le cercle familial ; il y a mon malaise d’esprit, mon
manque d’énergie qui m’a fait beaucoup trainer ces derniers temps me rendant
incapable de faire certaines choses que je prévoyais et notamment de me mettre
à des textes que je m’étais promis d’écrire ; il y a mes réveils
intempestifs, mes moments insomniaques, des insomnies plutôt languides et non
pas créatives comme parfois ; il y a le printemps qui ne vient pas :
dimanche matin, j’étais seul, je suis parti faire un tour en vélo pour me
booster, je ne m’étais pas assez couvert au vu du soleil qui brillait, il y
avait une mauvaise bise, j’ai eu froid, ça m’a cassé ma balade, ça m’a obligé à
revenir plus vite et j’en garde en plus un désagréable grattement de
gorge ; et ce matin encore, je suis parti au bureau à huit heures et demi,
sous une grisaille et une froidure tenace, épaules et menton rentrés et les
yeux picotant à cause de l’insuffisance de mon sommeil.
Il y a surtout, et sans
doute est-ce cela qui m’a fait le plus mal, ce que j’appelle le syndrome de
l’huitre, le fait de me rétracter de façon quasi réflexe face aux opportunités
et aux sollicitations de la vie, exactement comme une huitre se contracte sous
le trait acide du jus de citron.
En groupe j’offre en général
l’aspect du type à l’aise, plutôt joyeux et bien dans ses pompes. Sauf que ce
n’est que le personnage. Derrière ça rame. Je me rétracte et ne fais pas
l’effort qu’il faudrait pour aller vers les gens. Je fuis et retourne à mon
petit cocon, à mes petites lectures, à mes petites écritures ou du moins je le
voudrais mais je n’y parviens même pas car je me prends à les détester en ne
les voyant plus alors que comme un pauvre dérivatif.
Je ne sais plus où j’ai lu
cette maxime : va là où tu as peur. Je n’ai jamais été très fort pour ça.
Quand il faut trancher entre prise de risque et repliement sur sa petite
sécurité, je sais bien quelle est la ligne de plus grande pente chez moi.
Parfois, porté par la dynamique du moment, je réagis bien. Mais il suffit que
je me sente un peu fragilisé pour retomber dans mes vieux réflexes négatifs.
J’en ai eu au moins deux exemples dans les derniers jours et c’est ce marasme
là qui m’est le plus pénible. C’est le retour de l’éternel vieil homme, c’est
le retour de l’homme immobile.
Bon faut pas dramatiser. Ça
ira mieux demain. On fera que ça aille mieux. D’ailleurs, ça va déjà mieux. Ce soir
en sortant du bureau, il y avait un vague soleil, ça m’a fait du bien, j’ai pu
ouvrir mon blouson, c’est drôle je crois que je deviens de plus en plus météo
dépendant…
Je vais mettre du mouvement
dans tout ça heureusement grâce aux vacances qui arrivent. Dimanche nous
partons dans le midi. On va retrouver la maison, le concret extrême des
préoccupations du chantier, ça me fera du bien, tiens, ça me sortira de mes
récurrentes interrogations existentielles.