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Les échos de Valclair
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16 avril 2010

Un cancer

Parmi les pensées qui, ces derniers jours, m’ont pas mal plombé, il y a le cancer de ma sœur. Il n’y a pas que ça puisque je ne me sentais déjà pas au mieux de moi-même et pour des raisons qui me sont bien plus internes bien avant cette annonce qui ne date que de quelques jours. Mais n’empêche ça en rajoute une couche…

Ce n’est pas une petite tumeur isolée et bien localisée et l’éliminer va nécessiter une opération qui sera lourde de toute façon. Les médecins disent « c’est pris à temps » mais ne disent-ils pas ça systématiquement, comment peuvent-ils savoir, les analyses ne sont même pas terminées.

Alors bien sûr je ne peux m’empêcher de gamberger :

Il y a cette ombre de la mort et qui se fait proche de moi parce que nous fûmes, ensemble, petits enfants.

Il y a la pensée de cette incongruité, de ce désordre dans le flux normal des générations. Peut-être va-t-elle mourir avant son père, avant le père ? Bien sûr ça arrive, ça peut toujours arriver à tous : mais la pensée, qui habituellement n’en est qu’abstraite, lointaine, se fait là terriblement concrète et présente.

Il y a la pensée du silence entre nous, de tout temps, inséré dans un plus vaste silence familial. Cette femme qui m’est proche je ne la connais pas, nous n’avons jamais eu de complicité d’adolescent, ni de relations profondes à l’âge adulte et soudain je me dis que peut-être ça manque terriblement, peut-être ça va manquer irrémédiablement.

Je pense à son fils aussi, mon neveu, adolescent fragile, et qui n’a pas de père, qui n’a que sa mère malade en face de lui.

Lorsque mon père m’a annoncé la nouvelle, je l’ai trouvé très placide, trop, faisant des commentaires distancés et vaguement moralisateurs. C’était comme s’il ne réalisait pas vraiment ou faisait semblant de ne pas réaliser. Mais aujourd'hui déjà je l’ai senti bien plus soucieux et anxieux en profondeur.

En écrivant ces mots je me dis : est-ce que là je ne me laisse pas aller à un excessif dévoilement de l’intime. Car quoi de plus intime que la maladie. Je ne parle pas que de moi, sur qui j’ai tous les droits. Je parle des autres sur lesquels je n’en ai aucun puisque je ne leur ai rien demandé. Mais j’ai écrit pas mal d’entrées hors ligne ces derniers temps. Elles me sont indispensables sur certains sujets mais de plus en plus elles me semblent perdre sens de n’être pas données. Alors tant pis je passe outre.

Pour l’instant je suis seul à la maison. Constance est allée dîner avec une des ces amies. Je me suis fait un rapide frichti arrosé d’un bon verre de vin et maintenant j’écris, enveloppé par la voix de Melody Gardot qui crée autour de moi un cocon à la fois doux, tendre et mélancolique, bien adapté à l’état de mon humeur. Finalement je me sens paisible, je ne me sens pas mal. La musique, les mots auxquels je m’astreins y sont sans doute pour quelque chose.

Dimanche nous partons dans la maison du sud. Nous emmenons mon père qui n’est pas retourné là-bas depuis son voyage précipité au lendemain de l'incendie. C’était prévu avant l’annonce de la maladie de ma sœur et il n’y aurait aucun sens à modifier nos plans, nous serons rentrés au moment de l’opération.

Life goes on, life must go on…

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Commentaires
V
Je rentre et découvre tous vos messages. <br /> <br /> Curieusement j'étais moi très éloigné de pensées autour de ça pendant tous ces jours, même si la présence en était là, en arrière fond. Oui ma sœur m'est assez lointaine et je ne suis pas sûr, pas sûr du tout, plutôt dubitatif même, que cette maladie soit l'occasion d'un rapprochement. Nous verrons...<br /> <br /> Mais en tout cas je vous remercie chaleureusement de vos pensées ou de vos remarques, vous tous, proches ou plus lointains. Je les prends toutes en compte, certaines me font réfléchir et auraient appelé d'autres commentaires mais je préfère pour l'instant les garder pour moi. Oui je vous remercie vraiment.
A
Oui, il y a un avant et un après l'annonce. Et puis ensuite il y un jour après un autre jour. Et beaucoup de guérisons au bout. <br /> Pas sans prix.<br /> Pour les proches, c'est souvent une course de fond. C'est aussi des moments où l'on retrouve l'importance de gestes primaires, basiques. Acheter le pain, passer un gant frais, être là, s'occuper de déplacer un fauteuil, se préoccuper du chaud, du froid, du doux.<br /> Il se dit tant, souvent, dans ces gestes minuscules.<br /> Je vous souhaite de tout coeur le souffle et la victoire.
G
Ce n'est que récemment que j'ai compris que parler de la maladie, la sienne ou celle d'un proche (si toutefois on ne donnait pas de détails que la personne ne souhaitait pas), ce n'était pas dévoiler de l'intime, pas tant que ça (1), et surtout ça pouvait être utile aux autres.<br /> Par exemple le blog que tenait MDA a été pour ça un formidable rassembleur de courage et solidarités et informations pratiques.<br /> <br /> Alors je crois que si on sent nécessaire d'en parler, il faut y aller.<br /> <br /> <br /> (1) après, toujours se méfier de problèmes de confidentialité face à l'emploi puisque dans cette société pour trouver un travail ou le conserver il convient d'être un animal performant.
C
Je passe de temps en temps...rarement et puis ton billet m'a beaucoup émue parceque j'ai vécu cela avec ma belle soeur, je l'ai d'ailleurs moi-même écrit dans mon blog. Ce qui m'inquiète un peu dans ce que tu dis c'est que ta soeur n'a pas de compagnon... Ma belle soeur aurait très mal vécue ces dernières années si mon frère n'avait pas été à ses côtés. Il a été dévoué, toujours présent à ses appels de détresse, présent aussi à l'hopital lors des chimios. Alors moi-même je me suis posée la question : et si j'étais malade...qui s'occuperait de moi autant qu'il l'a fait pour elle ? Cette présence indispensable qui gère les médicaments, les rendez-vous, les repas servis au lit en cas de grosse fatigue ? Peut-on demander tout cela à un enfant même grand ? Je ne crois pas. <br /> Ta soeur aura besoin de beaucoup d'attention, c'est peut-être l'occasion de lui montrer que malgré la distance qu'il semble y avoir entre vous, tu es là, tu es présent. Peut-être est-ce l'occasion de la redécouvrir...et de faire qu'elle te découvre ?
E
Je viens seulement de te lire moi aussi. Je voudrais te dire que les médecins n'affirment pas à la légère que "c'est pris à temps". S'il y a doute là-dessus, ils cherchent plutôt à se couvrir. Donc s'ils ont dit ça, c'est bon signe.<br /> <br /> L'espoir n'est pas forcément spontané mais il peut être construit.<br /> <br /> Et si cela peut te permettre de te rapprocher de ta soeur et de la connaître mieux, il en sera sorti quelque chose de bon.
Les échos de Valclair
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