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Les échos de Valclair
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30 janvier 2009

Froidures

J’en ai marre de cette froidure qui ne nous lâche pas.

Aujourd'hui ça va un peu mieux, il fait froid mais sec, avec un ciel lumineux, c’est déjà ça.

Mais tous les jours précédents c’était, sous un ciel uniformément gris, un froid humide, venteux, pénétrant, trouvant à s’insinuer malgré les manteaux fermés.

Habituellement j’aime bien les vingt minutes de marche qui me mènent à mon bureau, je les effectue avec une part d’allégresse, même si c’est pour aller rejoindre un travail dans lequel les satisfactions sont devenues rares. J’apprécie cette sorte de sas ouvert à la rêverie par lequel je transite entre deux pans de ma vie. Mais tous ces jours derniers j’ai effectué ce parcours menton dans le col, corseté, tendu, trouvant la marche longue, interminable. Et je me traîne en plus un rhume dont je ne parviens pas à me défaire et qui racle dans mes bronches.

Alors, plus que d’habitude, cette froidure, cet hiver qui ne veut pas finir, me pèse et joue sur mon moral. Une froidure qui s’insinue dans le cœur aussi.

Hier, en plus, il y avait la grève que je n’ai pas faite et j’en étais mal à l’aise.

Je me sens à côté, ailleurs, conscient de la dureté des temps et en même temps, de moins en moins concerné. C’est une autre froidure : ma froidure à l’égard du monde !

Je me pose de plus en plus la question du sens de la grève dans un service public. Qu’est ce que ça aurait apporté de constructif que mon service soit fermé aux usagers ? Je ne suis pas le seul d’ailleurs : manifestement pas mal de gens notamment dans les transports ont hésité pour des raisons similaires (enfin, j’imagine aussi à cause de la perte de salaire) tout en étant solidaire du mouvement. On a vu aussi les agents d’EDF dans le sud-ouest continuer à remettre en fonctionnement les lignes tout en se manifestant grévistes.

En fait c’est plus mon absence de participation à la manifestation qui m’a pesé.

J’aurais voulu y être, moi qui suis un fonctionnaire protégé, par solidarité avec ceux qui sont directement touchés par la crise, qui se retrouvent au chômage ou dans des situations de plus en plus précaires. Et aussi pour affirmer mon opposition aux choix qui sont faits et notamment aux coupes sombres effectuées dans certains services publics.

Mais là encore pas d’évidence. Avec qui défiler ? Je me sens totalement décalé des revendications syndicales de ma petite corporation qui répète depuis des années les mêmes slogans et s’est montré incapable de tracer des voies de réformes indispensables. Je n’avais aucune envie de marcher avec eux. On se sent bien à manifester quand on est dans l’appartenance. Au moins dans une appartenance groupale à défaut d’une appartenance politique ou syndicale. Mais je ne me sens plus d’aucune appartenance. Alors marcher de ci de là en m’agrégeant à tel groupe ou à tel autre juste comme ça ? Ou pire me mettre sur le côté de la manif et regarder défiler comme le ferait un quelconque cacique du PS, écharpe tricolore en bandoulière ? Je ne supporte pas, rien ne me met plus mal à l’aise que ce comportement de voyeur.

Je me sens exilé par rapport à ma vie professionnelle. J’appartiens à des services qui sont très bousculés et qui me paraissent même condamnés dans la forme dans laquelle ils existent. Je ne les défends pas tels qu’ils sont, je vois trop ce qui dysfonctionne mais je n’ai pas l’énergie d’un engagement quelconque dans tout ce qui se trame pour leur transformation. Je laisse filer en me disant que la retraite n’est plus si loin. Ce comportement du type « après moi le déluge » m’est profondément antipathique, il me fait mal, mais je ne parviens pas à en avoir un autre et depuis pas mal de temps déjà.

Quand j’ai quitté le bureau, le soir déjà tombait, le soleil qui avait percé dans la journée, s’était éteint et de nouveau c’était cette froidure grise, et mon retour, après une journée vide, n’était pas plus gai que mon aller…

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Commentaires
V
D'un côté tu me rassures Fauvette, je vois que je ne suis pas le seul, enfin je le sais de toute façon, mais c'est vrai que nous n'avons pas à en être fiers.<br /> Filo filo, c'est la bonne attitude c'est sûr. Cela dit à mon boulot aussi il y a eu des choses positives, j'ai repris à certains moments du poil de la bête avec des collaborateurs plus toniques, mais je constate que j'ai malgré tout tendance à m'éloigner de plus en plus.<br /> Merci Telle de ce clin d'oeil que je prends avec le sourire et la distance nécessaires mais l'exemple (ou les souffrances!) des grands hommes ne sont pas forcément roboratives pour le vulgum pecus.
T
C'est Beethoven aussi qui sentait une terrible froidure l'envahir, non ? et il n'avait pas encore pondu ses chefs-d'oeuvre...
F
M'approchant de la retraite aussi (dans moins de dix ans), j'ai aussi "laissé filer" pendant quelques années. Mais depuis 5 ou 6 ans, j'ai rencontré des jeunes aux idées saines, qui en veulent, qui travaillent d'arrache-pieds, avec un esprit d'équipe (pas comme ces vieux singes dont le but était d'être la seule star à briller au firmament) et pour eux, j'ai eu encore l'envie de les appuyer, de collaborer côte à côte, même si, Valclair, comme tu dis, ces derniers matins j'ai bien eu du mal à me lever et à trottiner pour prendre le train.
F
Je comprends ta morosité : se sentir et se maintenir "en dehors" tout en étant concerné, ne contribue pas à la joie de vivre...<br /> Finalement, c'est bien ce que nous devenons, notre génération : nous "laissons filer"...<br /> Je t'avoue que je n'en suis pas vraiment fière tu sais...
V
Bonne idée ça, Ada, car la perspective d'y aller en solitaire a dû contribuer à me retenir... <br /> Car les bonnes raisons d'y aller par ailleurs ne me manquaient pas!
Les échos de Valclair
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