Restaurants
Je suis dans une ville
lointaine quelque part en France, dans le midi, peut-être à Bordeaux. Je
cherche une maison à acheter. Je ne sais plus si ma recherche a été positive,
toujours est-il que je me retrouve avec un nombre indéterminé de personnes,
sans visage, sans individualité reconnaissable mais avec lesquelles je sais que
je dois reprendre le train vers Paris dans la soirée.
Nous cherchons un
restaurant. Nous sommes au centre ville. Aucun de ceux devant lesquels nous
nous arrêtons ne convient. Pour l’un c’est l’aspect que nous trouvons sinistre,
pour un autre c’est le prix, menu banal de simple brasserie : « 78 €
le menu! vraiment non, qu’est ce que c’est que ça, c’est bien plus cher qu’à
Paris, c’est incroyable ! »
Nous décidons de remonter
vers la gare. Là nous trouvons une grande brasserie presque vide avec un étage
qui fait restaurant plus cossu. Nous montons à l’étage : on nous dit qu’il
y a trois heures d’attente. On s’étonne. On nous répond : « ah mais
c’est qu’il y a beaucoup de réservations, les gens vont arriver ». Même
chose en bas. Mais là on nous parle de six heures d’attente ! Les
serveuses nous répondent en ayant l’air d’être désolées mais tout en affichant
des sourire niais qui nous donnent l’impression qu’elles se moquent franchement
de nous. Les personnes qui sont avec moi disent : « d’accord on
attend » et s’installent à une table avec une placidité qui m’exaspère.
Moi je ne veux pas, je m’énerve, je bouillonne. Je dis : « nous
allons rester assis des heures dans le train tout à l’heure, je ne veux pas
passer en plus des heures scotché ici, c’est insupportable ». Une serveuse
un peu plus compatissante me dit : « mais non le train ça va vite,
votre voyage ne va pas durer des heures ». Je dis : « si car notre train a plein d’arrêts ». Je cite des villes selon un parcours pour le
moins fantaisiste : Angoulême, Saintes, Limoges, Poitiers, Vierzon... Je
discute pied à pied avec la serveuse sur l’ordre des gares. Je me rends compte
que je me trompe et je m’en veux de mes erreurs. La serveuse me tourne le dos
en disant : « de toute façon il y avait beaucoup plus rapide, vous
vous êtes fait avoir en prenant votre billet ».
Je suis de plus en plus en
colère. Je sors du restaurant et abandonne ma troupe. Je traîne dans les rues
de la ville. ma valise derrière moi. Ma colère ne décroît pas, bien au
contraire j’ai l’impression qu’elle me submerge de plus en plus. A un moment je
m’arrête et pour me défouler je donne des coups de pied dans ma valise jusqu’à
la faire éclater. Son contenu se répand sur le trottoir.
Là dessus je m’éveille…
Je voudrais vite noter les
images qui me restent de ce rêve. J’allume. Je réalise qu’il est 8 heures, nous
ne nous sommes pas réveillés. Là je ne suis plus dans le cauchemar mais dans la
réalité tangible du retard ! J’ai oublié hier, fin de week-end, de
rebrancher mon réveil et Constance manifestement aussi. On se lève
précipitamment. La rue est presque vide, tout est amorti, il a neigé assez
abondamment pendant la nuit. Peut-être est-ce aussi pour ça qu’on ne s’est pas
réveillé, il y a un silence inhabituel dans la rue, la lumière qui perce dans
la maison est plus chiche que d’habitude à la même heure sous cette aube très
grise.
Je pars très vite. Le temps
est sinistre. La neige se transforme en pluie. Au sol c’est une détestable
gadoue puis de véritables mares dans lesquelles on patauge. Crispé sous mon
parapluie, je rejoins à pas pressés mon bureau. Il fait un temps vraiment
épouvantable. C’est comme si la météo s’acharnait à prolonger le cauchemar.
La matinée s’est avancée.
J’ai fait ce que j’avais à faire mais étrangement et contrairement à l’habitude
le souvenir du rêve ne s’est pas dissout. Du coup à l’heure du déjeuner j’ai
pris un moment pour l’écrire. Je me doute bien que je reconstruis, rationalise,
réorganise sans doute plus que je ne l’aurais fait dans l’instant du réveil,
pourtant j’éprouve le besoin quand même de poser ces mots avant que le rêve ne
se soit totalement effacé.