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Les échos de Valclair
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13 avril 2009

Un livre que je n'aime pas

J’avance laborieusement dans la lecture de « Train de nuit pour Lisbonne » de Pascal Mercier.

Je n’accroche pas sur ce bouquin que pourtant beaucoup ont apprécié. Ça m’ennuie de dire ça, parce que c’est un livre estimable, écrit avec soin, dont le sujet est intéressant et qui regorge d’idées ou de formules qui font penser. Mais ça ne passe pas et j’essaie de voir ici pourquoi.

Le récit est l’histoire de Raimund Grégorius un professeur suisse de lettres anciennes, un homme exclusivement, caricaturalement, homme de tête et homme de livres (« celui que ses collègues haineux appelaient papyrus parce qu’il avait plus vécu dans les vieux livres que dans la vie ») qui ressent après une rencontre mystérieuse un appel irrésistible vers une autre vie. Pour y répondre il abandonne brutalement ses étudiants, ses collègues, ses livres, bref tout ce qui faisait sa vie et se rend à Lisbonne à la poursuite de Prado, un médecin et écrivain portugais mort depuis longtemps. Il mène son enquête en rencontrant des personnes qui ont connu Prado et en méditant à partir d’extraits de son œuvre. Il fait ainsi progressivement sortir des limbes un personnage qui lui apparaît comme une sorte de maître qui lui serait destiné, et comme une image de ce qui aurait pu être une potentialité de sa propre vie.

J’ai l’impression que le récit suit un schéma trop simple et c’est ça qui m’ennuie. On assiste à une sorte de voyage initiatique sans véritable surprise. Bien sûr chaque nouvelle rencontre fait découvrir des aspects insoupçonnés de Prado mais on sait qu’il va en être ainsi de rencontre en rencontre.

Quant à Grégorius beaucoup de ses caractéristiques sont un peu caricaturales et les effets de l’initiation paraissent téléphonés : ainsi portait-il de grosses lunettes inélégantes, à peine arrivé à Lisbonne, il rencontre une opticienne qui lui fournit de nouvelles lunettes légères qui modifient sa physionomie, il portait des « nippes usées et déformées », le voici poussé par on ne sait quelle impulsion à aller se choisir un joli costume dans un magasin.

Le récit apparaît donc comme trop démonstratif. Est-ce parce que c’est un livre de philosophe et pas un livre d’écrivain, qu’il est construit à partir d’une idée et pas à partir du chatoiement de la vie ?

Je tiens à le terminer pourtant. J’aurais des scrupules à ne pas aller au bout, à la fois par respect pour le travail de l’auteur et parce que j’espère toujours que finalement les choses vont se mettre en place et que je vais finir par pouvoir dire : « quand même c’est rudement bien ». Mais là , au point où j’en suis, à plus de la moitié du pavé j’ai vraiment des doutes.

J’ai vu cet après-midi « Villa Amalia ». c’est aussi l’histoire de quelqu'un qui sort de sa vie, d’une façon différente mais encore plus radicale que Gregorius. J’avais bien aimé le livre de Quignard, le film de Jacquot m’a impressionné même s’il n’est pas très facile d’y entrer, notamment pendant toute la première partie. Huppert est étonnante, par la variété et l’incarnation de son jeu, par les métamorphoses de son corps et de son visage. Par moments elle paraît juvénile, à d’autres elle fait presque vieille femme, c’est très troublant. Pour le spectateur qui se laisse prendre, tout passe par l’émotion, pas par l’intellect, et l’émotion surgit des sensations que provoquent les visages, les images, le sons.

Ce dont parle de façon un peu trop démonstrative Pascal Mercier à travers son personnage de Gregorius, la tentative de chercher l’autre en soi, de déployer les autres sois que chacun porte en lui même, les vies rêvées et non vécues, n’est ce pas au fond le sujet de beaucoup d’œuvres de fiction, pour ne pas dire de toutes.

En tout cas, puisque je m’en vais en voyage je mets ce bouquin dans mes bagages, je le finis et reviens vous dire mon impression finale si jamais elle devait changer. Pour l’instant je m’efface et m’en vais profiter moi aussi de quelques jours d’ailleurs, mais d’une façon toute pépère, en chambre d’hôtes et chez le fiston.

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Commentaires
V
Certainement ce n'est pas un livre ridicule loin de là et c'est bien pourquoi je suis un peu mal à l'aise de ne pas l'aimer.<br /> Je l'ai terminé et n'ai pas été plus séduit par la fin. Je reprendrai bien le terme de "bourratif" que Dasola emploie pour un autre livre de Mercier. <br /> Cela dit je trouve que c'est dommage que je n'ai pas aimé parce qu'en même temps j'ai trouvé dedans beaucoup de thèmes très intéressants et quelques formules très fortes.<br /> Et bien sûr Fuli, heureusement, qu'on n'aime pas tous les mêmes choses, sinon ce serait d'un ennui!<br /> Merci de tes appréciations Micheline, ça me fait très plaisir.
F
Ma première impulsion (à laquelle j'ai vaillamment résisté) a été d'écrire "Ah, c'est dommage que tu n'aimes pas ce livre..." et puis j'ai gambergé et je me suis dit non, c'est très bien comme ça. Mâme quand on a beaucoup de goûts en commun, on n'est pas obligés d'aimer toujours les mêmes choses, et les différences peuvent être de bonnes occasions de discussion, de confrontation d'opinions. Et quand les interlocuteurs sont de bonne foi, ce qui est incontestablement ton cas, c'est tout à fait positif.<br /> <br /> Je suis d'accord avec le fait que le livre de Mercier soit "un peu trop démonstratif", parce que, comme tu le dis très justement, "construit à partir d'une idée". Mais cela ne m'a pas empêchée d'entrer dedans et de m'y sentir à l'aise.<br /> <br /> Sceptic, je t'accorde que les premières pages ne sont pas des plus réussies, et je trouve aussi le récit de la rencontre sur le pont assez mal venu, mélo et tout ce qu'on voudra. Il faut avoir la persévérance de continuer. Car de là à conclure que c'est un livre "ridicule", non, cent fois non.
S
C'est un livre ridicule, que j'ai achete trop vite parce que le titre m' avait evoque tout a fait autre chose. Achete aussi sur la foi des commentaires reproduits sur la jaquette et dont je ne m'explique pas l'enthousiasme. Je ne sais pas ce que cela donne en allemand ou en francais, mais la version anglaise m'a degoute au bout de 15 pages. C'est maladroitement ecrit, et les situations et les personnages ainsi decrits semblent particulierement debiles ( la rencontre sur le pont !!! Au secours, JK Rowling !)
D
Bonjour Valclair, c'est dommage que tu n'apprécies pas ce roman que personnellement j'ai beaucoup aimé. Il n'est pas forcément très facile à lire (voir mon billet du 04/10/07). En revanche, j'ai lu avec beaucoup de mal (j'ai même trouvé que c'était un "pensum") un autre roman de P. Mercier: l'accordeur de piano (1998). C'est statique et presque "bourratif". J'ai eu du mal à le finir (j'ai renoncé à en faire un billet). Bonne journée.
M
la nuance, la prudence, l'honnêteté..la vérité de soi...en construction..<br /> je n'ai pas l'habitude de venir déposer un éloge préfabriqué après un rapide coup d'oeil..<br /> seulement te dire que je me sens en connivence avec ta manière de dire et de ressentir<br /> je n'ai plus beaucoup de temps valide dans mes journées..mais je viens te lire ...<br /> bonne aération chez fiston.
Les échos de Valclair
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