Entracte
Nos vacances ne sont guère
dans le farniente et guère non plus dans les ballades et les explorations.
Depuis notre arrivée ici on a passé la plus grande partie de notre temps en
rendez-vous avec l’architecte et les entreprises, l’observation des travaux sur
le chantier, les visites dans les magasins de sanitaires et de carrelage, les
discussions pour arrêter nos choix. Les décisions essentielles sont prises
depuis un bon moment mais on arrive maintenant au choix des détails
d’aménagement et c’est ce qui est le plus long. On se plonge dans les budgets,
on se confronte à des choix voire à des abandons nécessaires, car on arrive aux
limites de notre indemnisation par l’assurance. On vit quasi sur le chantier
puisque nous campons dans le petit appartement du rez-de-chaussée à peu près
terminé tandis qu’au premier et au second les divers corps de métiers
s’activent. Le gros œuvre avance rapidement, les principaux réseaux sanitaires
et électriques sont faits, cette semaine c’étaient surtout les plaquistes qui
étaient à l’œuvre, posant les isolations et les faux-plafonds et montant les
nouvelles cloisons.
Mon père qui loge chez ma
cousine vient nous rejoindre en fin de matinée, il suit à demi ce qui se fait,
un peu affolé par l’ampleur des travaux et les transformations que cela induit
par rapport à la maison telle qu’il l’avait connue mais il est heureux en même
temps de sentir que cette maison va revivre. Entre deux rendez-vous nous
prenons le temps de quelques balades dans la campagne environnante et dans la
« montagne » et au bord des lacs au-dessus d’ici.
Le temps va vite, on n’a pas
vu passer la semaine, je n’ai guère eu de temps pour des retours sur moi-même, je
n’ai pas écrit, j’ai à peine lu car je m’endors vite dès que je me couche et
mes réveils intempestifs, car il en est toujours, sont occupés de pensées
autour des travaux et des choix que nous avons à faire.
Alors dans ce maelstrom le
week-end c’est l’entracte. Ce dimanche matin, il fait beau, je prends ce bref
temps d’écrire, la maison sans ouvriers au travail est parfaitement calme, j’écris
devant la fenêtre ouverte sur le jardin. D’amples nappes de soleil se déversent
dans la pièce. Des chants d’oiseaux aussi et je m’en berce dans l’inhabituel silence.
La glycine en pleine floraison à cette heure sent délicatement alors que sur le
soir son odeur devient puissante, quasi entêtante. Les iris qui commençaient à
peine à s’ouvrir hier se sont épanouis en une seule journée et forment
maintenant de multiples taches bleues au milieu des herbes hautes.
Je vais d’ailleurs ensuite travailler
un peu dans le jardin, continuer à passer la tondeuse (l’antique tondeuse
mécanique de mon grand père), éclaircir des massifs puis nous partirons faire
une grande marche avec mon père qui ne va pas tarder à nous rejoindre.
Ce soir au retour je ferai un saut au cyber café (s’il est ouvert !), j’irai relever mes mails, je posterai ce bref billet. Reconnexion ! Et écrivant ce billet, je me dis : l’aurais-je écrit si ce n’était que pour moi ? Sûrement pas. Je suis bien ici dans un billet « communiquant », qui donne des nouvelles, qui entretient ma présence en ligne au mi-temps de mon absence. Comme quoi je suis déconnecté mais finalement pas si déconnecté que ça en pensée.