Visite à la ferme
Hier je suis allé au Salon
de l’Agriculture, que les slogans aiment à présenter comme la plus grande ferme
de France.
C’était pour moi une
première. Je suis à priori rétif à ces manifestations monstres où l’on est noyé
par la multitude des sollicitations. J’en ai souvent fait l’expérience au Salon
du Livre où je ne vais plus que rarement. Et c’était d’autant plus vrai
concernant l’agriculture : aller voir des bestiaux entassés dans des
hangars parisiens, et traverser des stands de marchands fussent-ils de produits
gastronomiques des régions, bof, très peu pour moi…
Cette année j’y suis allé un
peu par curiosité (ça fait plusieurs années que je me dis : quand même il
faudrait aller y voir) et un peu par occasion, puisque le fiston y passe la
semaine, jouant comme tous ses camarades de promo les petites mains dans
l’organisation dans le cadre d’un partenariat entre son école et le Salon.
Et bien j’y ai passé un très
bon moment, surtout en début de matinée avant que la foule ne devienne vraiment
trop compacte. Il y a une vraie ambiance et un vrai dépaysement dans cette
promenade. Et ce n’est pas l’ambiance commerciale qui domine même si elle est
aussi naturellement présente. Le salon draine des parisiens comme nous (sans
parler des gens qui viennent pour s’y montrer), mais aussi quantité de gens de
province et des campagnes, montés à Paris pour l’occasion. C’est sensible
d’emblée dans l’habillement, dans les visages hâlés par le grand air, dans les
accents variés que l’on entend. C’est assez chouette ce mélange, c’est autre
chose que les expos au Grand Palais ou que le Salon du Livre. A l’intérieur, du
moins lorsque, comme nous, on entre par le hall numéro un où sont regroupés les
bovins, on est saisi par une solide odeur de ferme. On a parcouru le salon en
long et en large mais c’est bien ce qui tourne autour des animaux qui est le
plus intéressant. On peut se dire que c’est un peu monstrueux pour les bêtes de
se retrouver dans cette ambiance, elles doivent se demander ce qui leur arrive,
on les préfèrerait paissant dans leur prairies. N’empêche il y a là ce plaisir
de voir réunis les plus beaux spécimens des races diverses, certaines que je ne
connaissais même pas. Nous avons assisté à une partie du concours pour les
Salers. Quelles bêtes magnifiques ! Il y a aussi la fierté palpable des
éleveurs qui sont là qui fait plaisir à voir, il y a quelquechose de beau dans
le rapport qu’ils entretiennent avec leurs bêtes (même si l’on sait que tout ça
finit à l’abattoir pour le plus grand plaisir des carnivores que nous
sommes !). Et je n’ai pu m’empêcher non plus de ressentir cette pointe
d’envie que j’ai parfois à l’égard de gens dont la pratique professionnelle est
enracinée dans le concret, dont le geste professionnel produit un résultat visible,
et d’autant plus s’ils entretiennent un rapport proche avec la nature vivante,
moi qui ne suis professionnellement qu’un homme assis, qu’un homme de papiers
et de mots, des mots dont on ne sait jamais trop s’ils pèsent de façon
quelconque dans la réalité.